14/09/2023
Saluée en passant, une femme d'une cinquantaine d'années, tenant l'une des boutiques du centre commercial au pied de la résidence senior dans laquelle j'ai emménagé il y a maintenant six mois, m'arrête et me parle. Elle est sur le départ, ce sont les mots de la porte, délivrés gracieusement avant que nous ne nous voyions plus.
Elle me dit que je suis connue dans le centre commercial, et reconnue et aimée, très aimée : femme belle passant, souriante ; senior vive, mince, élégante, en des tenues souples ; personne ayant un mot et un regard pour chacun ; écrivain travaillant au milieu de tous, debout, devant son ordinateur posé avec un café sur table haute.
J'écoute, émerveillée. C'est la vocation que je voulais ! Ce m'est accordé et très vite accordé. Je regarde le visage de cette femme. Il resplendit de tendresse. Je me risque dans le regard. Il est étonné, amusé, en même temps que profondément respectueux. Je reçois tout cela, qui confirme le message. Oui, ma vocation nouvelle m'est déjà donnée.
Je voulais être en ce lieu présence réconfortante pour ceux qui sont nés après moi, de toutes cultures et de toutes conditions, en particulier pour ceux que l'on appelle les invisibles au travail et pour les jeunes qui ont si peur – et il y a de quoi ! – de vieillir. Je m'étais donné cette « vocation », de l'ordre du faire sans faire, dans l'aveu de ma faiblesse en mon âge mais sans honte ni plainte, tout en dignité et modestie.
J'en avais informé la Vie. Sans attendre de réponse, j'étais rentrée dans cette « vocation ». Voici que la Vie me fait savoir que tout est agréé, déjà. J'en déduis que c'est à poursuivre, jusqu'en Ehpad, le cas échéant.
Reconnaissance ! Triple reconnaissance ! Je suis émue que cette femme me dise gracieusement ce qu'il en est ; je lis en sa parole la parole, non due, de la Vie ; je me vois, sans en tirer orgueil, détentrice d'une puissance nouvelle que je ne crains pas d'avoir et disposant d'un pouvoir nouveau que j'entends continuer d'exercer, pour faire l'existence plus humaine.
