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05/10/2019

En ma jeunesse et a fortiori en l’heure, qui fut précoce pour moi, de la ménopause, j’ai décidé de ne pas devenir une grosse chatte à coussin, mais de rester cette chatte haret que, pour avoir été chassée, il me fallut devenir, maigre, en des conditions de vie précaires, devant combattre pour subsister et se contenter de peu, d’un peu jouissif et superbe, tout de liberté. J’ai donc définitivement pris mes distances avec le confort classique.

Pour ma fin de pratique professionnelle quand elle sera, j’ai décidé de ne jamais partir à la retraite, ce que, sauf exception, je perçois comme une Bérézina, notamment du point de vue intellectuel, parce que cette dimension de l’être ne se suffit pas d’expositions à la mode et de voyages avec spa ou de gentilles conférences dans la ville, mais requiert le choc rude avec les cadences contrariantes et les rencontres difficiles, voire pénibles, dé-coiffantes.

J'entrerai en retraite, et ce sera avec de fermes ambitions, dont celle, obstinée, d’un accroissement de l’intelligence spirituelle - et cérébrale ! - en laquelle se joue la souveraineté jusqu’au bout quoi qu’il arrive, y compris l’entrée en délire.

Pour ma vieillesse sous forme de voyage, j’exclus le naufrage. Présomption ? Non, confiance, confiance durement élaborée dans les abandons et les chagrins antérieurs. Je veux donc aller toujours. Ce sera sans doute connaître l’immobilité…

Je veux donc monter toujours ! Ce sera assurément, descendre.

Kénose, disons-nous en notre culture ! Je la choisis ! Cela peut paraître prétentieux. Et alors ? C’est fou, je le sais, mais folie très sage, dirait l’apôtre. Cette folie seule est sagesse donnant saveur même à ce qui est redoutable et redouté. D’autres, qui nous précèdent, en ont témoigné, amis pour quand c’est dur !

Car l'ascension de la Montagne va toujours plus profond. Je veux cette dynamique : savoir dans la platitude, savoir black-boulée, savoir perdue et éperdue, trouver l'extase vérifiée par l'enstase. Il n'est d'autre Lieu.

Qui entre dans cet accord avec l’existence, ou plutôt avec la Vie en son existence ainsi, ne peut plus connaître le naufrage. Il est comme dissout dans un Océan de splendeur. Il ne reste plus que l’écume, superbe éclat dans le tourbillon soulevé. Je veux dire par là que le naufrage n'empêche nullement l'accomplissement. Il peut être, si l’on se garde de toute complicité avec le « je souffre dons je suis », la résurrection, avant même que celle-ci ait eu lieu.

Je n’invente pas : j’ai vu ! J’en ai été et en suis témoin dans les chambres d‘hôpital et d’établissement pour personnes dépendantes en fin de vie.

Je dirai même que nous n'avons pas encore réussi dans l’existence tant que nous n’en sommes qu’aux réussites d’une existence, tant que nous n’avons pas encore fait de la faillite personnelle un acte solaire, tant que nous n'avons pas encore su, sans complaisance aucune avec la destruction, transformer l’échec en coucher de soleil glorieux. Et pourquoi pas ?

Je le veux. La Vie s'emploiera, le moment venu, à m'y aider.

* Et déjà…

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