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23/07/2024

Me voici en route vers la librairie juive, difficile à trouver. C'est à l'étage d'une grande maison du Strasbourg allemand, quartier où se mêlent toutes les spiritualités, y compris athées.

Je gravis le cœur battant l'escalier sombre et, quand s'ouvre silencieusement la porte devant moi, qui pourrait être d'un appartement ancien, presque vieillot, me retrouve dans un espace digne d'un film. Cest un dédale d'étagères montant jusqu'au plafond, toutes lourdes d'un trésor de livres en savant, très savant désordre, dans lequel je ne déambulerai pas puisque le responsable du lieu s'enquiert aussitôt de ma demande et pourvoit.

La transaction a quelque chose de fabuleux. Je cherche du très pointu, que les non juifs généralement ne compulsent pas, Tehilim, Colbo, 2014. Le libraire écoute apparemment sans étonnement aucun. Il accueille avec bienveillance et sérieux la femme que je suis, d'une tout autre culture que la sienne, ce que nos vêtements différents marquent avec netteté. La confiance est là aussitôt, réciproque.

Le libraire voit bien de quoi je parle, craint de ne pas avoir, va vers l'étagère où devrait être le commentaire biblique désiré, le trouve aussitôt. Il le prend et me le remet d'un geste précis.

Je repars le cœur toujours battant, le livre déjà aimé serré contre moi. Dans l'escalier sombre, je me sens portée par le sourire de cet homme d'un autre monde que le mien qui a refermé la porte derrière moi en continuant de faire confiance. Je sais que, pour lui, cela ne va pas de soi parce que le livre contient le nom de Dieu, Le Nom ! En moi, c'est grave et doux. Immense reconnaissance à l'égard de la vie...

Pendant longtemps, je n'ouvre pas le livre. Il trouve aussitôt une place, sa place, bien que mon studio soit petit, mais demeure fermé. J'attends son heure.

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